« Avec la formalisation des contrats de travail initiés par la fondation ICI, entre producteurs et travailleurs, c’est aujourd’hui un véritable soulagement pour tous ».
C’est en ces mots que s’est exprimé Pierre Koudougou, administrateur de groupe depuis quatre ans au sein de la Société Coopérative de Production et de transformation de produits agricoles (SOCOOPEM) de San Pedro, au sujet de l’importance et du rôle joué par le comité des droits humains (CDH) au sein des coopératives et communautés. Ces comités bénéficient d’un appui de la fondation ICI, qui à travers un projet pilote, veut tester et adapter de nouvelles approches, outils et mécanismes de prévention, d’identification et de réponse aux risques de travail forcé dans cinq coopératives ciblées et leurs communautés bénéficiaires.
Qu'est-ce que le travail forcé dans le secteur du cacao ?
Le travail forcé est défini comme un travail effectué involontairement et sous la menace d'une sanction. En pratique, cela signifie que l'absence de consentement et la menace d'une sanction sont toutes deux nécessaires pour qu'il y ait travail forcé.
Dans le secteur du cacao, les indicateurs courants sont les suivants :
- L'absence de consentement comprend le fait pour les travailleurs d'effectuer des tâches qui n'étaient pas spécifiées au moment du recrutement, de travailler plus longtemps que prévu ou d'effectuer des tâches pour d'autres employeurs.
- La menace de sanctions comprend la retenue du salaire ou la confiscation des documents d'identité.
Toutes les parties prenantes concernées doivent comprendre ce qu'est le travail forcé dans le secteur du cacao aujourd'hui, ainsi que les droits et responsabilités des travailleurs et des employeurs.
Pour les enfants, le travail forcé s'entend comme le fait de travailler en raison d'une sanction (ou de la menace d'une sanction) infligée par une personne autre que les parents. Il peut s'agir d'une menace à l'encontre de l'enfant ou des parents. Les enfants peuvent aussi être considérés comme victimes de travail forcé parce que leurs parents eux-mêmes sont victimes de travail forcé.
Selon les responsables de coopératives agricoles et les autorités coutumières desdites localités, de nombreux conflits entre producteurs et travailleurs naissaient d’une absence de contrat formel de travail. De nombreux litiges ont porté sur le contenu exact des tâches à exécuter par un travailleur. Lesquelles tâches n’étaient pas toujours reconnues par ce dernier. Ainsi, les comités des droits humains des coopératives basées en communautés, jouent aujourd’hui un rôle central dans la promotion et le respect des droits des travailleurs et producteurs. Des activités de sensibilisation ont lieu auprès des communautés de façon hebdomadaire pour les informer des risques liés au travail forcé et promouvoir l’utilisation des contrats de travail.
Selon le témoignage de Thomas Regtoumda, Administrateur de groupe à la Société Coopérative agricole de Gnato (SOCAG)
« désormais tout est clair dans les contrats de travailet cela met fin aux malentendus d’autrefois entre producteurs et travailleurs. »
Désormais un producteur ne peut plus abusivement et impunément retenir le salaire de son travailleur. Car ce dernier connait ses droits et les voies de réclamation auprès du comité des droits humains.
« Aujourd’hui avec les contrats de travail mis à notre disposition par la fondation ICI, mon employé et moi faisons très attention. Car la signature a eu lieu en présence de deux témoins. Mon employé peut me convoquer chez le chef du village si je manque à mes devoirs vis-à-vis de lui. Et moi aussi je peux mettre fin à son contrat s’il ne respecte pas ce que nous deux, avons signé » s’est exprimé Oumarou Sawadogo, producteur de cacao depuis 2019, à Youkou, un village de Djourouto dans le département de Tabou.
C’est la même réalité dans les villages de Soukoura (Méagui) et Massata (Tabou). Rouné Brou Kouamé, travaille dans le champ de cacao de Thomas Kouamé depuis plus d’un an. Ici, à Massata, c’est en présence de deux témoins que son contrat de travail a été signé. Et depuis lors, il n’existe aucune difficulté majeure dit-il, entre son employeur et lui. « Je bénéficie de deux jours de repos et ma rémunération est régulière et respectée » nous-a-t-il confié. Les témoins, étant signataires aux contrats, peuvent intervenir en premier recours pour résoudre les différends entre les producteurs et les travailleurs.
Gilbert Thé Thaud, chef du village de Youkou, lui, se félicite du bon fonctionnement du comité des droits humains. Car de nombreux conflits ont été réglés par ledit comité dont il est membre.
« Désormais, les contrats sont signés en bonne et due forme. Notre joie serait de voir ces contrats s’étendre à d’autres cultures ».
« En cas de litige, le CDH est saisi et trouve des solutions. » nous explique Didier Oupayou, point focal des réclamations et des plaintes au sein du CDH de Youkou. Quand il reçoit les plaintes émanant la plupart du temps des travailleurs, son rôle est de les écouter, puis les enregistrer dans un registre et une tablette, avant de les transmettre au comité des droits humains composé de dix membres dont sept membres de base en communauté.
Pour rappel, depuis 2019, la fondation ICI s’est engagée dans la lutte contre le travail forcé dans les zones cacaoyères, avec pour objectif d’améliorer les conditions de vie et de travail des travailleurs agricoles. Dans la mise en œuvre du projet pilote dans cinq coopératives et leurs communautés, la fondation a mis en place plusieurs activités, incluant entre autres des formations et des appuis à des campagnes de sensibilisation sur le travail forcé, la mise à disposition de contrats de travail entre producteurs et travailleurs avec l’obligation d’inclure des témoins à la signature et la mise en place des Comités des droits humains. Avec des membres en coopérative et des membres en communauté, ces comités supervisent et gèrent la prévention, l'identification et la gestion des cas des infractions aux droits de travailleurs et aux droits humains.